Reconnaissance internationale de nos bleuets et de notre sirop: pas pour demain!

IStock_000008293597XSmall[1] Qu’ont en commun le fromage Roquefort, les noix de Genoble, le piment d’Espelette et le champagne? Oui, ce sont des produits français que l’on peut déguster. Mais ils sont aussi tous protégés par une appellation dite d’origine contrôlée (AOC). Cette certification officielle de qualité est délivrée par un organisme relevant d'un ministère et ceux qui l’utilisent illégalement peuvent faire l’objet de poursuites.

La loi québécoise protège quatre types d’appellation. Mais décrocher une appellation réservée relève de l’exploit chez nous. Il a fallu près de 15 ans au fameux agneau de Charlevoix pour être reconnu comme IGP (Indication géographique protégée). Produire de l’agneau n’a jamais été rentable au Québec, explique Annie Morin du journal Le Soleil. On paie les producteurs en fonction du poids de la bête et un agneau, ça ne pèse pas lourd…

En quoi la situation de notre province est-elle différente de l’Europe où l’image des appellations (sigles et logos) est omniprésente? Peut-on espérer voir un jour nos produits comme les bleuets du Lac-Saint-Jean, le cidre de glace, le sirop d’érable ou les canneberges décrocher une reconnaissance internationale? Rien n’est moins sûr!

Au Québec, la Loi sur les appellations réservées date de 1996. On y a ajouté les mots " termes valorisants" en 2006. Cette nouvelle Loi souhaite avant tout protéger l’authenticité des produits et des désignations en soulignant les qualités spécifiques de certains d’entre eux. On veut aussi s’assurer de l’intégrité des produits afin que les consommateurs se sentent en confiance lorsqu’ils les achètent.  

Les 4 catégories d’appellation sont :

• L’appellation biologique existe depuis février 2000. Le logo Bio Québec assure au consommateur que les produits agroalimentaires répondent à des exigences développées pour les entreprises d’ici et qu’au moins 95 % des ingrédients sont d’origine biologique. Ces produits « se distinguent par un plus grand respect de l’environnement, de meilleures conditions de vie pour les animaux d’élevage et l’élimination des substances d’origine non naturelle (pesticides, OGM, etc.) des aliments ». Douze pour cent de notre sirop d’érable serait certifié biologique.

• L’appellation d’origine (AO) fait référence au lieu géographique (pays, région ou localité) d’où provient le produit. Cette notion est aussi intimement liée avec les facteurs naturels du terroir et le savoir-faire des gens du coin. C’est très difficile à obtenir.

• L’attestation de spécificité souhaite mettre en valeur non pas l’origine, mais une tradition. « Le produit agricole ou la denrée alimentaire qui bénéficie de cette appellation doit, par exemple, être obtenu à partir de matières premières traditionnelles (emmental au lait cru), présenter une composition traditionnelle (confiture à l'ancienne) ou présenter un mode de production ou de transformation de type traditionnel. »

• L’indication géographique protégée (IGP) établit « un lien entre un produit et une région. Elle désigne un produit dont une qualité déterminée, la réputation ou une autre caractéristique peut être attribuée à cette région et dont la production ou la transformation ou l'élaboration ont lieu dans l'aire géographique délimitée. »

C’est dans cette catégorie que se retrouve l’agneau de Charlevoix. L’IGP est moins stricte que l’appellation d’origine (AO) puisque la provenance géographique n’est pas garantie.

Le 21 juin dernier, le Conseil des appellations réservées et des termes valorisants (CARTV) a reçu une demande officielle de reconnaissance de l’IGP Cidre de glace du Québec. Le dossier sera examiné et une décision sera rendue dans les prochains mois.

Pourquoi y a-t-il si peu de produits d’ « appellation » au Québec?

Les producteurs qui souhaitent certifier un produit distinctif doivent présenter un dossier étoffé sur ses spécificités. On doit notamment s’entendre sur les méthodes de production. Dans le cas du cidre de glace, il existe une controverse liée au lieu de pressage des pommes et à leur provenance. Les grands producteurs souhaitent sous-traiter certaines étapes alors que les plus petits exigent que tous fassent pousser et presser leurs pommes eux-mêmes.  

Obtenir une appellation d’origine québécoise coûte également cher, explique Patrice Resther un spécialiste du marketing alimentaire (dossier Le Québec en 2020 : Jobboom.com). Il faut compter « de 50 000 $ à plus de 100 000 $ pour l’ensemble des producteurs impliqués dans une AO, si on calcule les études de marché, les démarches auprès du gouvernement, le recours à des experts-conseils, etc. »

Bien que ça ne soit pas si coûteux pour une grande entreprise, la plupart des produits de notre terroir sont produits par de petits artisans. Et c’est sans compter les campagnes de publicité, rappelle-t-il.

L’Amérique et ses marques de commerce

Enfin, contrairement à l’Europe, l’Amérique (États-Unis, Canada) accorde souvent plus d’importance au potentiel commercial d’une marque qu’à celle d’une appellation. Nos entreprises d’ici mettent avant tout en valeur la marque déposée de leurs produits (Jus V8 qui est la marque déposée des jus de légume de la compagnie Les Soupes Cambell). Les publicités sont plus ciblées et la marque prend beaucoup de place. C’est une approche commerciale moins communautaire et plus individualiste, diront certains.

Qu’en pensez-vous?